Précarité des financements

 

Jnea Image http://www.assorennes.org/La-crise-est-dans-l-associatif

 L' appel de FAC 

1 - Vie associative et démocratie

Quel que soit leur secteur d’activité, les associations concourent au développement de la vie sociale et démocratique d’au moins deux manières :

  • Par les activités qu’elles proposent, elles permettent à des citoyens d’entrer en contact avec des réalités culturelles, sportives, artistiques, sociales, politiques etc. dont ils sont souvent éloignés du fait de leur histoire (scolarité, immigration, difficultés matérielles ou familiales etc.) et de leurs conditions de vie, souvent marquées par la précarité.
  • Par leur fonctionnement même, elles sont des lieux d’apprentissage de la vie démocratique et de l’action collective, du fait qu’elles nécessitent une implication des citoyens, soit en tant qu’élus ou militants associatifs, soit en tant qu’adhérents et usagers amenés, en participant à la vie associative, à exercer une activité et à (re)prendre la parole pour exprimer leurs points de vue. Ainsi par sa nature même et du fait qu’elle est proche des habitants, de leurs besoins ou de leurs centres d’intérêts, la vie associative est le premier niveau indispensable à l’émergence d’une démocratie participative digne de ce nom, c’est à dire impliquant des citoyens représentatifs des réalités de la population locale et attentive à ses besoins.

Parce qu’elles ne se situent pas dans le cadre institutionnel « officiel », parce qu’elles reposent largement sur le volontariat, hors du champ commercial et hors des champs de la contrainte et de la hiérarchie, les associations sont les seuls instruments collectifs de ré appropriation de la parole accessibles par les populations les plus précarisées. Ainsi en est-il particulièrement des associations d’éducation populaire, dont les préoccupations et les activités sont précisément centrées sur cette problématique de rendre la parole et les moyens de l’action à ceux qui en sont privés.

2 - Quelles ressources pour les associations ?

Compte-tenu de la spécificité du monde associatif, et particulièrement des associations d’éducation populaire, seule une infime minorité des associations peuvent s’autofinancer sur la seule base des cotisations demandées à leurs adhérents et ceci d’autant plus que celles-ci s’adressent à des publics précarisés.

A cette impossibilité de trouver un public solvable, s’ajoute le fait que le développement de projets d’éducation populaire représente un travail très important et de longue haleine, impossible à réaliser sur des bases uniquement militantes, et impliquant le recours à des emplois salariés, même si la dimension bénévole reste importante et indispensable. Ainsi le recours des associations d’éducation populaire au financement public est-il à la fois légitime, de par leurs buts visant à la ré appropriation de la citoyenneté par les populations, mais également indispensable en raison de la nature même des projets à mettre en œuvre pour atteindre ces buts. Or l’accès au financement public a évolué vers des modalités totalement en opposition avec cette réalité.

  • a) Du financement du fonctionnement au financement sur projet Ainsi, alors que c’était autrefois le mode de financement de loin de le plus répandu, il est devenu désormais quasiment impossible pour une association d’être financée, même partiellement, par des subventions de fonctionnement. Désormais, toute obtention de fonds publics doit obligatoirement passer soit par une candidature à un appel d’offres, soit par une demande de financement par projet. Par ailleurs les contributions publiques ne financent les projets que partiellement, ce qui suppose soit que les associations aient des fonds propres pour financer le complément, ce qui est impossible, soit qu’elles trouvent un ensemble de collectivités ou organismes financeurs susceptibles de couvrir le coût total du projet. Or la lourdeur des démarches à engager et les délais nécessaires au montage des dossiers sont tels qu’il est impossible d’attendre d’avoir la certitude d’un financement complet avant de commencer à réaliser les projets (d’autant plus que certains organismes demandent d’avoir la preuve de l’engagement de ceux-ci pour accorder leur aide...). Les associations sont ainsi conduites à avancer des fonds sur la base de promesses d’aide, sans garantie d’obtenir à terme les financements annoncés.
  • b) Des modalités d’attribution en contradiction avec les objectifs annoncés De plus en plus fréquemment, les arrêtés attributifs de subvention écartent tout salaire des sommes éligibles et n’acceptent pratiquement que des charges externes, alors même que les salariés des associations sont précisément et principalement affectés à la réalisation des projets ! Ainsi, a-t-on vu par exemple des subventions de la Région Rhône Alpes exclure explicitement les salaires des sommes éligibles (de plus de manière totalement imprévisible, cette condition n’ayant jamais été évoquée préalablement). Une action conjointe des associations victimes de cette politique de la part de la direction de la démocratie participative, a permis d’obtenir que cette exclusion des salaires soit supprimée à l’avenir... or les nouvelles modalités d’attribution, si elles n’écartent plus explicitement les salaires, prévoient néanmoins que la part des charges internes ne peuvent excéder 50% des sommes éligibles... ce qui, de fait, revient à exclure une grande partie des salaires qui sont de très loin l’essentiel des charges internes des associations !
  • c) Des raisons inacceptables invoquées à l’appui de cette évolution. Plusieurs séries de raisons sont invoquées pour justifier cette évolution des modalités d’attribution du financement public des associations :
    • Certaines sur le thème de l’emploi Les collectivités, tout en communiquant largement sur le thème du soutien à l’emploi associatif, expliquent qu’elles veulent rester libres d’accorder ou non une subvention. Or elles estiment que si elles acceptent de financer les salaires, elles risquent en cas de refus de subvention d’être accusées de « tuer les emplois » des associations. Mais la conséquence de cette manière de faire est que cela rend tout simplement impossible l’emploi associatif, sauf sous forme précaire ou de contrats aidés financés par l’État ! Dans ces conditions la seule solution pour les associations serait de sous-traiter le travail à des prestataires externes au lieu de réaliser elles-mêmes leurs projets, permettant ainsi à ces prestataires d’être les véritables bénéficiaires des fonds publics sous couvert d’aide à la vie associative...
    • D’autres en lien avec la « Révision Générale des Politiques Publiques » (RGPP) ou la Loi Organique pour les Lois de Finances (LOLF) La RGPP a conduit récemment à des coupes budgétaires importantes dans le financement des collectivités. Or, face à ces diminutions importantes de leurs ressources, les choix qui sont faits par les collectivités consistent pour l’essentiel à les répercuter sur les associations en supprimant ou réduisant fortement leur financement, tout en préservant les budgets alloués à des opérations de communication ou de prestige dont le caractère prioritaire peut être pour le moins considéré comme discutable... Quant à la LOLF, elle impose désormais que toute ligne budgétaire accordée soit accompagnée d’objectifs mesurables et que la collectivité qui en a la responsabilité fasse la « preuve » qu’elle a obtenu des résultats performants grâce à l’utilisation de ces fonds, le présupposé général inspirant ce dispositif étant que les destinataires de fonds publics ont a priori toujours tendance à les gaspiller ou à les détourner de leur objectif initial !

La traduction concrète de ce dispositif est la disparition des subventions de fonctionnement jugées sources de gaspillage et de dépenses sans contrôle et par conséquent inefficaces, au profit de financement par projets censé plus contrôlable et par conséquent plus « performant ». Or il s’agit là tout d’abord d’un a priori fondé sur une confusion : « subvention de fonctionnement » n’est en aucun cas synonyme de « financement sans contrôle ». Il est en effet tout à fait possible de vérifier l’utilisation des fonds et sa conformité aux buts des associations bénéficiaires, tant sous forme de contrôle sur pièces conduit par les financeurs que par le recours à des audits externes par exemple. Il s’agit ensuite d’une illusion sur le caractère plus contrôlable des dépenses dans le cadre de projets. L’affectation de dépenses, en tout ou partie, à un projet est en effet largement sujette à variations en fonction des critères utilisés... sauf à rendre inéligibles la plupart des dépenses, de manière souvent arbitraire, et finalement contraire au but affiché de soutenir les projets !

3 - Mais des conséquences bien réelles sur les associations

Les associations sont pénalisées par ces évolutions de deux manières :

  • tout d’abord, la recherche de plusieurs sources de financement pour chaque projet leur impose de consacrer une grande partie de leurs ressources déjà limitées (qu’elles soient bénévoles ou salariées) au montage et au suivi des dossiers (ce qui au passage peut être considéré au regard de leurs buts comme un gaspillage financé sur fonds public !...).
  • ensuite, la précarisation du financement des associations les conduit, soit à prendre des risques hors de proportions avec leurs moyens, soit à ne plus prendre que des engagements à court terme, que ce soit vis à vis de leurs salariés en précarisant les emplois, ou en renonçant à développer des projets s’inscrivant dans la durée, limitant ainsi leurs ambitions et réduisant leur champ d’action.

4 - Changer les règles du jeu pour vraiment soutenir la vie associative

Nous  considèrons  qu’il est urgent pour la démocratie et pour la vie associative qu’un débat public ait lieu et que ces pratiques soient remises en questions. Nous  continuons  de considérer que les associations contribuent à la vie démocratique et doivent être à ce titre éligibles au financement public, au moins autant par exemple que les entreprises qui bénéficient d’une fiscalité avantageuse dans des zones franches urbaines avec des résultats pas toujours perceptibles.

Nous  continuons  à considérer l’allocation de subventions de fonctionnement comme un moyen indispensable à l’existence et à la survie des associations, et rappelle encore une fois que « subvention de fonctionnement » n’est pas nécessairement synonyme de « financement sans contrôle », confusion souvent entretenue pour motiver la suppression de ce mode de financement.

Nous   ne renoncerons  pas à développer des projets en direction de nos concitoyens les plus précarisés et éloignés de leur droit légitime à participer à la vie démocratique.

Nous continuerons  pour ce faire à solliciter des financements publics et fera savoir le cas échéant quels obstacles lui sont opposés par les collectivités.

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D’après Insee Clap, en France, les associations représentent plus des ¾ des salariés de l’économie sociale et solidaire en 2006, soit 9,8% de l’emploi avec une croissance de 4,2% sur une année. Les secteurs d’activités les plus concernés sont les activités financières et assurances (sous formes de coopératives et mutuelles), l’éducation populaire (sous forme d’associations) et les services aux particuliers et aux entreprises (également sous formes d’associations). En matière de financement, la principale ressource reste les subventions publiques, et ceci bien avant les emprunts bancaires et la générosité privée.

 Le nombre de ces structures augmentent en moyenne de 4% chaque année et on en recense aujourd’hui plus de 1,1 million dans le pays. Cependant, selon une récente étude réalisée au CNRS, les financements de l’Etat ont décrû de 5% alors que ceux des conseils généraux ont augmenté de 20% entre 1999 et 2005. Ce contraste se justifie par la répartition des fonds publics. En effet, les plus anciennes associations voient leurs budgets à la baisse tandis que les petites nouvelles les voient à la hausse. Mais la viabilité des autres associations est en péril… une partie d’entre elles, dépendantes de l’Etat, n’ont pu survivre à cette baisse de financement. La question des collectivités relais est soulevée mais n’apporte comme seule réponse que la possibilité d’un financement de façon partielle… et seulement pour certains types d’associations.

Au vu du nombre croissant des associations, le désengagement de l’Etat les amène à se concurrencer les unes et les autres pour l’accès aux ressources publiques et privées et au travail salarié et bénévole.

 

De l’autre côté de la Manche, un plan d’aide d’urgence a été lancé. Le gouvernement britannique débloquera 40 millions de livres soit près 50 millions d’euros pour venir en aide aux associations caritatives, premières victimes de la crise. Les difficultés économiques et la dégradation du pouvoir d’achat entraînent une baisse des dons, ce qui contraint les associations à licencier une partie de leurs salariés.

 

 

 

En fin d’année dernière, c’est à l’éducation populaire de se prendre un douloureux uppercut. Supportant les effets négatifs de la crise (contraintes économiques, suppression de poste d’enseignants…), les Associations éducatives complémentaires de l’enseignement public se voient confisquer les renforts mis à disposition par l’Education Nationale, soit 25% de leurs subventions de 2008. Cette diminution bien plus brutale qu’inattendue menace encore plus fort leurs actions sans compter leurs emplois. Reconnaissant le rôle essentiel dans le domaine de l’éducation et de la cohésion sociale de ces associations, le ministre de l’éducation nationale a déclaré que les moyens consacrés aux associations d’Education populaire passaient de 75 à 114 millions d’euros pour 2009. La décision de ce dernier repose sur celle de la passation d’une « logique de financement de structure à une logique de financement de projets ». Or, cette logique fait déjà état depuis janvier 2007. La promesse d’un engagement financier semble dès lors moins crédible et en contradiction avec l’avenir prévisible des associations.

Oubliées du plan de relance, les autres associations encore en activité se voient contraintes à se ménager différemment en vue d’une diversification des sources de financement. En premier lieu, elles vont, pour la quasi-totalité, être amenées à réduire considérablement leurs budgets. De plus, cette diversification présente des limites car toutes les associations ne sont pas habilitées à recevoir tous types de financement. Les associations d’action sociale ne peuvent qu’en majeure partie bénéficier de dons privés et de mécénat d’entreprise contrairement aux associations sportives qui vivent principalement de cotisations. Dans le contexte économique actuel, ces solutions de recours de plus en plus utilisées risquent d’orienter leurs actions en direction d’un public plus solvable.

 


Pour un financement public du fonctionnement des associations

Conférence permanente des coordinations associatives

Loi 1901 ..silence on assassine

 

Fédération d' Education Populaires pour les Arts et la Culture au quotidien

 Les associations autour de l' école  pour une meilleure gestion des rythmes de l' enfant